Articles de presse

Les anti-mondaines de la littérature 20minutes.fr 16/11/2012

En toute discrétion

roman, BM Blues (Belfond, 18 €), paru au début de sa carrière en 1993. Après un accident où il a perdu sa sœur, un jeune homme de bonne famille se fait embaucher par un entrepreneur de BTP pour conduire sa voiture : choc des générations, choc des classes sociales.

Best-sellers sans marketing
Françoise Bourdin est inclassable : elle écrit des histoires qui se déroulent en province mais ne sont pas de la littérature de terroir, bourrées de sentiments sans être à l’eau de rose. Et ça marche : 7,5 millions d’exemplaires vendus en France, quatre romans adaptés en téléfilms, onze langues de traduction et environ 300 000 exemplaires vendus par roman. De quoi agacer les habituels ténors des meilleures ventes qui n’atteignent pas ces niveaux, dignes d’un Goncourt.
Même fièvre acheteuse pour les livres de Juliette Benzoni, une jeune fille de 92 automnes, qui s’est spécialisée dans le roman historique. « C’est notre Alexandre Dumas en jupons », souligne Frédérique, l’une des fans les plus affûtées de cette grand-mère espiègle et bien née, à laquelle elle consacre un blog, bibliojbenzoni.unblog.fr. Après sa saga sur les Borgia, Juliette Benzoni vient de démarrer une autre trilogie, La Guerre des duchesses (Plon, 21,50 €), quand ses séries « Catherine », « Le Gerfaut » et « Marianne » sortent sur liseuses. Depuis 1964, elle a publié dans 35 pays 79 titres qui lui valent plus de 300 millions d’exemplaires vendus. Avec Françoise Bourdin, elle partage le goût d’une langue simple et généreuse, sans afféterie, pour raconter des histoires qui instruisent et font voyager leurs lectrices. Peut-être est-ce cela la mystérieuse recette du succès d’un livre.La presse les boude, le public les adore : Juliette Benzoni et Françoise Bourdin incarnent toutes les deux ce que l’on appelle avec un peu de mépris l’easy reading. Ce n’est pas un genre, juste une manière de nommer des auteurs qui ne sont pas adoubés par le milieu littéraire, qui préfèrent les histoires qui finissent bien et qui rassemblent un important lectorat, plutôt composé de ménagères de plus de 40 ans. Encore que : « Mon public s’est beaucoup rajeuni et les hommes aussi se mettent à me lire », glisse Françoise Bourdin. Cette jolie femme à cheveux courts, discrète jusqu’à la simplicité, vient de ressortir un roman,

 Karine Papillaud

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Article dans le magazine La Croix du 11/07/2012

Le succès de bouche à oreille (1/5)
Juliette Benzoni, l’histoire dans la peau

Chaque semaine, cet été, l’aventure du succès d’un écrivain plébiscité par le public, loin du battage médiatique. Aujourd’hui, la doyenne du roman historique.

SANDRINE ROUDEIXOPALE

SANDRINE ROUDEIX/OPALE

Ce jour-là, Juliette Benzoni vient tout juste de mettre un point final à son dernier roman. Comme tous ses livres, elle l’a écrit en sept mois. « Le premier mois, je prépare et fais des recherches. Ensuite, je rédige », explique-t-elle. Pendant des années, elle a couru les bibliothèques, à la recherche d’anecdotes et d’aventures à raconter.

Désormais, c’est Anne, sa fille, qui se charge des recherches sur Internet et lui « corrige menu »  ses manuscrits. Très rigoureuse, la romancière s’impose un programme strict auquel elle se tient depuis toujours. Chaque matin, elle s’installe devant sa vieille machine à écrire pendant trois heures. Pas de brouillon, tout juste un plan. Les personnages, les dates, les couleurs : tout est dans sa tête.

Le reste de son temps est en grande partie consacré à la lecture. Elle adore les romans policiers et historiques anglais – ceux d’Agatha Christie, d’Ellis Peters, d’Anne Perry et de Ken Follett –, apprécie Éric Emmanuel Schmitt et Marc Levy, mais ne « raffole pas »  de Proust. « J’aime et je n’aime pas en même temps,  dit-elle. Il est un peu assommant ! »  Elle regarde un peu la télévision, surtout la messe chaque dimanche, et fait des mots-croisés, pour entretenir sa mémoire. Elle reçoit souvent de la visite dans sa maison, à Saint-Mandé (94). Amis et voisins viennent partager des petits gâteaux et siroter un café – « celui de George Clooney ! » , précise-t-elle.

À 92 ans, Juliette Benzoni est la doyenne du roman historique. En cinquante ans de carrière, elle a écrit près de 80 romans, « deux tous les quatorze mois » , indique-t-elle. Traduits dans une vingtaine de langues, ces livres se sont écoulés à plus de 300 millions d’exemplaires. C’est dans sa passion pour l’histoire que Juliette Benzoni puise son énergie. La romancière est « tombée dans la marmite »  à l’âge de 9 ans, en découvrant Jeanne d’Arc dans un manuel. « Cela a été un choc » , se souvient-elle. La lecture des Trois Mousquetaires , d’Alexandre Dumas, puis de Victor Hugo, finit de la convaincre.

La Renaissance italienne, le temps des croisades, la guerre de Cent Ans : chaque période de l’histoire lui inspire des fresques dans lesquels rois, princesses, duchesses et chevaliers s’aiment, se trahissent, s’affrontent. À travers l’œil de belles héroïnes – Fiora, Hortense, Sylvie – elle entraîne son lecteur sous les alcôves des châteaux et les dorures des palais, ressuscitant au fil des pages le cardinal Richelieu, Louis XIV, Marie-Antoinette ou Charles X. Elle ne s’aventure cependant jamais au-delà des années 1930. « C’est une période que j’ai vécue et qui me tente moins. Je ne veux pas aborder la guerre » , explique-t-elle.

Malgré l’engouement suscité par la plupart de ses livres, les médias ne lui ont consacré que peu d’attention. « On m’a peu sollicitée. Mais j’ai tout de même eu le droit de temps en temps au  Figaro littéraire ! raconte-t-elle. J’ai tout de suite été classée dans la catégorie “roman populaire”. Cela m’a longtemps exaspérée. Si cela signifie que l’on est beaucoup lu, d’accord. Mais si cela veut dire que c’est plus ou moins écrit et bâclé… »,  s’agace-t-elle. Qu’importe. C’est d’abord pour ses lecteurs que Juliette Benzoni écrit. Son ambition ? « Les distraire en leur apprenant un petit quelque chose. »  L’idée qu’elle puisse les décevoir la hante à chaque nouveau roman. « J’ai toujours aussi peur. J’espère que cela marchera mais je n’en suis pas sûre »,  confie-t-elle. « Elle se fait toujours de la bile » , confirme sa fille. « L’écriture représente pas mal de nuits blanches » , souligne la romancière. Mais c’est aussi un formidable moyen d’évasion qui lui permet, un temps, de se détourner du drame qui a marqué sa vie : le décès brutal de son fils, Jean-François, il y a près de vingt ans.

Aujourd’hui, les lettres de ses admirateurs sont sa plus belle récompense. « Ce qui me fait le plus plaisir, c’est quand quelqu’un me dit qu’il était malade, en clinique, et que mon livre lui a fait du bien » , affirme-t-elle. Mais la plus illustre missive reste celle qui lui fut adressée, dans les années 1980, par un certain Ronald Reagan. Le président des États-Unis et sa femme, Nancy, la remerciaient pour sa description de la guerre d’indépendance dans Le Gerfaut des brumes , fresque en quatre tomes parue de 1976 à 1981, aux Éditions de Trévise. C’est aussi pour ce genre de surprises que Juliette Benzoni noircit encore des pages. Et elle compte bien continuer, « tant que Dieu  (lui) prêtera vie ».

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BIO – EXPRESS

Née en 1920 à Paris,  elle grandit à Saint-Germain-en-Laye (78) et à Saint-Mandé (94). À 21 ans, elle épouse un médecin et s’installe à Dijon. En 1950, à la mort de son premier mari, elle s’établit au Maroc, où elle rencontrera son second mari, André Benzoni.

Rentrée en France,  elle commence à travailler pour la revue Confidences,  pour laquelle elle écrit des histoires d’amour.

À 41 ans,  l’agence de presse Opera Mundi lui commande une fresque historique dans la veine de la série des Angélique.  Juliette Benzoni, qui a vécu dix ans à Dijon, connaît sur le bout des doigts l’histoire de la Bourgogne, en particulier le mystère de la Toison d’or. Elle en fera le sujet de sa première série, les Catherine  (sept tomes).  D’abord publiée sous forme de feuilleton dans France Soir , elle sera traduite dans plus de vingt langues et adaptée à la télévision par Marion Sarraut.

Suivront, entre autres,  la série des Marianne  (Éditions de Trévise), La Florentine,  Les Treize Vents,   Le Boiteux de Varsovie  ou encoreles  Secrets d’État , parus chez Plon.

La  Collection Kledermann,    douzième roman consacré aux aventures d’Aldo Morosini, prince vénitien expert en joyaux anciens, est paru en mars 2012.

JEANNE FERNEY

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Benzoni à la vitesse grand B Par Jean-Baptiste Michel et (L’Express), publié le 29/07/1999

Les Emeraudes du prophète passent les frontières et remontent le temps à toute allure. Servies par un imaginaire galopant

Elle écrit vite, Juliette Benzoni. En moyenne, un roman et demi par an. Elle pourrait même écrire mieux. Qu’importe. D’une saga à l’autre, son ?uvre prolonge la tradition de prolixité brouillonne et d’imaginaire galopant du temps d’Eugène Sue. Un auteur heureux, comme ses personnages. Nous sommes à Dijon dans les années 30: « Finissons de déjeuner et rentrons à Paris! Je m’y livrerai aux démarches nécessaires pendant que tu te rendras en Bohême. De là, tu n’auras qu’à gagner directement Istanbul où l’on se retrouvera au Pera Palace. »

Tel est le plan arrêté par le prince Aldo Morosini, expert en joyaux historiques, et par son ami l’archéologue Vidal-Pellicorne pour s’emparer de l’Ourim et du Toummim, deux émeraudes offertes, selon la légende, par Jéhovah au prophète Elie – et qu’un ambitieux rabbin, à Jérusalem, les a convaincus de lui rapporter en enlevant Lisa, la femme du prince. La vie de Lisa dépend de leur succès. Ils passent donc les frontières et remontent le temps à toute allure. De l’antique forteresse de Massada, où les joyaux ont disparu avec ce dernier foyer de la résistance juive, au romantique château de Hohenburg, en Allemagne, où ils ornent les délicates oreilles d’une grande-duchesse, c’est une frénésie de déplacements et d’associations d’idées historiques qui nous transporte de la bibliothèque de Dijon au cimetière juif de Prague, d’Istanbul, où repose le trésor des Sultans, à la Roumanie de Dracula. Les pierres rendues à Israël seront escamotées par la sagesse du grand rabbin et l’aventure se clôt par un dîner à l’hôtel King David, où les protagonistes enfin réunis s’en remémorent les péripéties dans une ambiance « élégante, fleurie et confortable ».

Ces émeraudes tombent dans le coffret de Juliette Benzoni aux côtés du Rubis de Jeanne la Folle, de L’Opale de Sissi, de ces belles pierres maléfiques qu’elle taille à la manière un peu brute de la comtesse Ilona, héritière de Dracula, qui, ayant lu le roman de Bram Stoker et vu toutes ses adaptations à l’écran, apparaît devant le héros stupéfait « vêtue d’une tunique noire parfilée d’argent dont les larges manches et le profond décolleté s’ourlaient de chinchilla ». Elle s’avance pour lui dire, non sans grâce ni humour, que le roman populaire, de nos jours, offre moins une vision qu’une télévision de l’Histoire.

 

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Un article dans « Jour de France » . Je mettrais juste un bémol. L’auteur de l’article parle de « fortune », je parlerais d’envie, d’amour et de besoin d’écrire. Cela n’engage que moi.

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  • Un article datant de 2008 par l’express. : Il définit ce coté obscur de la littérature française. certains auteurs pourtant reconnus par le public non pas de reconnaissance médiatique. Ci dessous un extrait de cet article concernant Juliette Benzoni:

« Elles n’ont ni la reconnaissance des écrivains intimistes ni la visibilité des auteurs en vogue. Et pourtant, elles tricotent les succès au mètre. Rencontre avec ces serial romancières.
Juliette Benzoni – La doyenne du roman historique

«Vous prendrez bien un peu de champagne? Je déteste les gens qui refusent de boire.» Quelques bulles donc, avant le sancerre rouge, en compagnie de la reine de la fresque historique. Avec ses faux airs de Bernadette Chirac, Mme Benzoni, 87 ans, dont plus de quarante-cinq d’écriture, aime la vie, tapant volontiers le carton le dimanche dans sa maison de Saint-Mandé. Ses cartes préférées? Le tarot, bien sûr, un bien beau jeu, avec rois, reines et cavaliers. Car voici longtemps que cette grande admiratrice d’Alexandre Dumas ne s’intéresse plus à la Ve République. C’est avec les siècles passés et sa mémoire phénoménale qu’elle ravit ses nombreux lecteurs (elle a vendu la bagatelle de 100 millions d’exemplaires dans le monde). 74, 75, 76… Personne ne sait, au juste, combien de livres a commis la charmante dame de Saint-Mandé, jonglant, depuis 1962, au fil de ses sagas (Catherine, Marianne, La Florentine, Le Boiteux de Varsovie, Le Sang des Koenigsmark…) avec les secrets d’Etat et d’alcôve, les guerres royales, les chevaliers au grand coeur et les mystérieux Templiers. Dès le 8 juin, elle s’attaque à une nouvelle série, chez Perrin, consacrée à Louis XIV et à l’affaire des poisons. Et après? «Il me reste à explorer Napoléon III, le xviiie, le Moyen Age…» Bref, Juliette Benzoni n’a pas fini de prier le Saint-Esprit («Tous les matins, pour l’inspiration») et de faire une petite action de grâce («A chaque parution»). « 

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  • Toujours l’express: Juliette Benzoni, studieuse nostalgique Par Marianne Payot , publié le 29/06/2011
    « À 90 ans, Juliette Benzoni publie un essai et un roman. Cette passionnée d’histoire est aussi une travailleuse effrénée.

    Et de deux ! On n’arrête plus Juliette Benzoni, 90 printemps, qui vient de publier simultanément deux ouvrages : un essai chez Perrin (Dans le lit des reines. Les amants) et un roman chez Plon (La Chimère d’or des Borgia), soit plus de 760 pages en tout. Un rythme effréné que la doyenne du roman historique tient depuis près de cinquante ans. Sa recette ? De la passion et du travail – à 7 h 45 précises, elle s’installe tous les jours à son bureau dans sa maison de Saint-Mandé (Val-de-Marne). Peu prisée par les médias mais plébiscitée par le public (elle a vendu plus de 100 millions d’exemplaires dans le monde de son oeuvre riche de quelque 80 titres), Juliette Benzoni, grande admiratrice de Dumas, a depuis longtemps délaissé la Ve République pour vivre dans les siècles passés. Style alerte et mémoire impeccable, elle devrait encore une fois ravir ses fidèles lectrices avec son millésime 2011. Qui seront emportées dans les alcôves royales (de Messaline la Romaine, d’Isabelle d’Angleterre, de Marguerite de Navarre, de la reine Hortense, de Marie-Antoinette…), puis chemineront en compagnie d’un Texan milliardaire à la recherche de la chimère d’or et d’émeraudes de César Borgia, afin de ravir le coeur d’une cantatrice qui se dit descendre des Borgia. En attendant les prochains crus…  « 

  • L’express:On découvre avec plaisirs des anecdotes de la vie de Juliette benzoni

    « Héritiers de la littérature populaire du XIXe, ces écrivains ignorés des télés, mais promus par les clubs de lecture, racontent des histoires, simples et sincères. Ils parlent des corons, des champs, des passions. Du rêve à grands tirages.Dans sa maison tranquille de Saint-Mandé, où vivent trois générations de femmes, l’historienne Juliette Benzoni rayonne de simplicité. Le début de sa carrière? Une émission de Sabbagh, qui s’intitulait «Le Gros Lot». A l’avant-dernière question, elle chute. Mais Paul Winckler, qui l’avait écoutée, lui met le pied à l’étrier, avec l’aide de Gérald Gauthier, d’Opera Mundi: «Vous avez une histoire?» «Oui, mes enfants sont bourguignons et je sais pas mal de choses sur l’ordre de la Toison d’or.» Après trois essais, Juliette Benzoni doit livrer 800 pages en deux mois: les deux premiers volumes de la série «Catherine» (1963) – republiés ce mois-ci chez Lattès – étaient pris en feuilleton par «France-Soir». Les 6 tomes seront traduits en 17 langues. De 30 000 en librairie, ses ouvrages, au nombre de 45 aujourd’hui, sautent à 300 000 quand ils sont sélectionnés par le club. C’est le cas des «Gerfaut», qui sont quatre, comme les trois mousquetaires. Dernier livre paru, «Les Treize Vents», un régal, traduisent l’amour enthousiaste de l’auteur pour le Québec du xviiie siècle assiégé par les Anglais. L’exil du jeune Guillaume Tremaine permet à Juliette Benzoni d’enraciner son histoire dans les environs de La Hougue et de Saint-Vaast, «des lieux moins exploités par les écrivains que le Cotentin» »Juliette Benzoni, 300 millions de livres vendus, jamais vue chez Pivot
    Elle est l’un des écrivains français les plus lus. Pourtant, qui la connaît ? Rencontre avec la Barbara Cartland du roman historique.

    On lui demande ce qui fait courir sa plume depuis plus de trente ans. Elle répond simplement: «J’aime ça.» On s’interroge sur l’engouement planétaire du public (50 millions de lecteurs); elle lâche, évasive: «Je crois que ça plaît aux gens.» On mentionne la cinquantaine d’ouvrages qui se sont vendus à 300 millions d’exemplaires dans le monde, les traductions en 22 langues, du finnois à l’hébreu, la sortie de son nouveau roman ( 1 ); elle s’inquiète: «Elle marche, la sonnette du portail ?»

    Juliette Benzoni, 78 ans, est un phénomène éditorial et elle s’en fout complètement. Jamais invitée chez Pivot, boudée par les critiques, cette vieille dame écrit tranquillement ses séries de romans historiques, calfeutrée dans son pavillon de Saint-Mandé, à un vol de moineau de Paris. C’est là, dans le silence d’un après-midi qui s’enroule autour des pampilles en cristal, bercée par la tiédeur des fauteuils Récamier aux coussins de velours, qu’une jeune fille aux cheveux blancs orchestre l’histoire. La Bourgogne à l’époque de Jeanne d’Arc, Florence en 1457, Paris sous le règne du Roi-Soleil, Venise aux lendemains de la Première Guerre mondiale… En haut de cet hôtel particulier, dans la chambre, le crépitement de la machine à écrire fait défiler enlèvements sauvages, secrets d’Etat, trahisons vengeresses et, surtout, passions contrariées. L’amour tient une telle place qu’on a surnommé Juliette Benzoni «la Barbara Cartland du roman historique». Pour celle qui se considère plus comme l’héritière de la littérature populaire du XIXe siècle, «le succès vient sans doute de là». De là ? «De rêves racontés dans une langue moderne, sans archaïsme d’époque.» Aux thrillers futuristes sur fond d’Internet, de manipulations génétiques et de menaces millénaristes, elle préfère les chevauchées royales, les taffetas à ramages et les éventails ajourés. Aux modes d’emploi du parfait bonheur quotidien, qui consiste à prendre une première gorgée de bière en contemplant l’aube naissante, cette presque octogénaire préfère l’action.

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    • Article de Marianne par Clara DUPONT-MONOD (19 avril 1999)
      Le veuvage, à 40 ans, la fit naître à l’écriture

    La psychologie l’ennuie: «Il faut tenir les gens en haleine, ne pas s’attarder.» Les héros de Juliette Benzoni sont toujours beaux et inventifs; les héroïnes, somptueuses et vaillantes. «C’est pour faire plaisir au public», sourit-elle. Un public fidèle aux épopées flamboyantes, le même, sans doute, qui suivit avidement le Comte de Monte-Cristo sur TF1. D’ailleurs, sourit-elle, «la passion de l’histoire m’est venue à 9 ans en tombant sur une image de Jeanne d’Arc. Alexandre Dumas a fait le reste.»

    Cette amoureuse des péripéties historiques, chouanne dans l’âme, révolutionnaire par la plume, fréquenta pourtant le très strict cours des Demoiselles du Désir et fut pendant longtemps une épouse de notable exemplaire. Partagée entre les bonnes oeuvres et l’éducation de ses enfants, Juliette Benzoni ne publia rien avant l’âge de 40 ans, date de son premier veuvage. Son mari était médecin. Il avait si bien soigné les prostituées du bois de Vincennes qu’en 1942, lorsque naquit le premier fils de Juliette qu’elle ne pouvait allaiter, les dames du bois l’approvisionnèrent deux ans durant en oranges fraîches. Il fallut donc un loyer à payer, plus une annonce dans le Figaro, en 1950: «On recherche, pour un journal, des gens sachant écrire des récits vécus», pour qu’elle se lance. Ses feuilletons dans le journal Confidences dureront vingt-quatre ans. C’est le même éditeur, Paul Winckler, qui lui demanda, pour France-Soir, une nouvelle Angélique. En inventant le personnage de Catherine, en 1961, Juliette Benzoni se dota d’une technique narrative qui est encore la sienne: tout est vu, senti, vécu, par le biais du personnage. Le livre parie sur l’identification du lecteur au héros, que facilite le réalisme des descriptions.

    Chaque volume demande deux ans de recherches historiques. Tout y passe: la chronologie méticuleuse, la couleur des robes, les dorures des palais… «La comparaison avec Barbara Cartland m’énerve, s’emporte-t-elle. On produit autant l’une que l’autre, mais, pour moi, c’est sans compter l’énorme travail de documentation.» Une fois les connaissances amassées, elle écrit d’une traite, à raison de trois pages quotidiennes. Résultat: deux livres par an.

    Le cri de la femme de ménage brisa net le manuscrit…

    Ce rythme effréné la rapproche de Max Gallo, autre stakhanoviste de l’écriture. Mais, si ce dernier jette son dévolu sur un personnage unique, les romans de Benzoni, en revanche, sont ceux de la multitude. «C’est une sorte de famille, explique-t-elle. Les personnages, une fois qu’on les a mis au monde, il faut vraiment les considérer comme des enfants. On ne peut pas leur faire faire quelque chose qui ne soit pas conforme à leur caractère. Ils prennent possession de moi.» Il arrive que ce petit monde déserte, la laissant seule, vide. Alors, le sommeil la déserte à son tour…

    La littérature d’échappée profite aussi aux auteurs. Benzoni puise dans ce cortège de visages de quoi s’oublier un peu elle-même. Elle s’offre des personnages qui «se tirent de toutes les situations». Ils la protègent de sa propre mémoire. Aucun ne lui inflige une deuxième fois ce cri entendu depuis le jardin, celui de la femme de ménage découvrant le corps de son fils mort, foudroyé par une attaque cardiaque, il y a quatre ans. Aucun ne lui rappelle qu’elle fut deux fois veuve. Chacun lui rappelle sa multitude à elle, quand son fils disparu, sa mère, morte peu après lui, et sa fille habitaient tous la maison de Saint-Mandé. Une fois seulement, ce fut elle qui abandonna sa «famille». Ce fameux jour où tout bascula avec la mort de son fils, Juliette Benzoni écrivait la série «le Boiteux de Varsovie». «Le cri de la femme de ménage a cassé net une phrase», se souvient-elle. Il brisa bien plus qu’une phrase. L’auteur raya d’un trait noir son manuscrit, et n’y toucha plus. Lorsqu’enfin elle se réconcilia avec ses propres mots, ce fut pour s’y noyer. «On peut arriver à tout laisser dehors. On retrouve le chagrin à la sortie», dit-elle. Certains aveux valent titres de noblesse.

    Les malheurs de Sylvie

    Par Tourres Marie, publié le

    Qu’arrivera-t-il à la ravissante Mme de Fontsomme? Pour le savoir, il suffit de lire Le Prisonnier masqué, de Juliette Benzoni

    L’angoisse de la page blanche, Juliette Benzoni ne connaît décidément pas. Cette ancienne journaliste, historienne passionnée, a aujourd’hui pris place dans la ronde des auteurs prolifiques. Dans les années 60, avec la série des Catherine, elle embrassa le succès. Voilà donc trente ans que Juliette Benzoni s’attache à raconter les petites histoires de l’Histoire. Plus de 50 ouvrages qui remportent à chaque fois les suffrages du public.

    L’intrigue du Prisonnier masqué se déroule vers 1660, à une époque où se côtoient jeunes mondaines élégantes, gentlemen mousquetaires et traîtres arrivistes, où une nouvelle boisson, le chocolat, imprègne les murs de Fontainebleau de doux effluves, où les rancoeurs de la Fronde entraînent vengeances et perfidies, où les hommes meurent en duel pour l’amour ou l’honneur de leur promise.

    Mazarin va sur sa fin. Colbert et Fouquet aspirent à le remplacer. Le Roi-Soleil, plutôt lunatique, est plongé dans les ténèbres de l’intolérance. La duchesse Sylvie de Fontsomme, une ravissante veuve, élève, loin de Paris, ses deux enfants: Marie, qui fait ses premiers pas dans le monde de la galanterie et des tourments amoureux, et Philippe, dont la naissance reste voilée par le secret.

    A la demande de Louis XIV, Sylvie se rend à la cour auprès de la nouvelle reine, Marie-Thérèse. Là, elle est amenée à revoir François de Beaufort, son amour de jeunesse, qui tua en duel son époux. Prêt à tout pour reconquérir la duchesse, François les protégera, son fils et elle, contre le danger qui les guette et le passé qui les rattrape.

    Pour ce troisième volet de la série Secret d’Etat, Juliette Benzoni se fait, une fois encore, chroniqueuse à la cour de Louis XIV. Elle nous emporte dans sa fiction au rythme des décès, des mariages et autres événements mondains des grands du royaume de France. De nobles sentiments, du sang, des larmes, du mystère, des rebondissements providentiels, mille et une anecdotes croustillantes, juste ce qu’il faut de préciosité pour coller à l’époque… Rehaussé par une écriture alerte, voici encore un best-seller en puissance né de la royale plume de Juliette Benzoni.

    Les belles histoires de Juliette

    Par Catherine Argand (Lire) (Lire), publié le

    En 1935, quand les parents de Juliette, qui avait quinze ans, sont arrivés à Saint-Mandé, les fermiers y trayaient encore les vaches. Aujourd’hui, tous les jours à 17h30, la Saint-Mandéenne promène Ours, son chien, dans ce quartier paisible et verdoyant aux portes de Paris. Juliette Benzoni, du nom de son second mari, un officier qui – Indochine oblige – la laissa en plan peu avant le voyage de noces qu’elle fit à Capri avec sa maman, est une star de l’édition. Son cinquante et unième roman historique, La chambre de la reine (Plon), est déjà dans la liste des best-sellers, quatre de ses romans, dont Le gerfaut des brumes, furent adaptés à la télévision et le nombre de ses lecteurs dans le monde (elle est traduite en 22 langues) frise les 50 millions. Un destin scellé dès l’enfance: à neuf ans elle découvre dans son livre d’histoire Jeanne d’Arc ficelée sur le bûcher. Quel choc! De ce jour sa passion pour l’histoire, en particulier pour le Moyen Age et la Renaissance, ne la quittera plus. Faute d’être journaliste ou ambulancière pendant la guerre (son papa ne veut pas), elle se met à écrire des histoires pour Confidences, passe à la télévision dans le jeu de Pierre Sabbagh, « Le Gros Lot », et, à la demande de l’éditeur Gérald Gauthierqui cherchait un feuilleton digne de succéder à Angélique sur le mode « tout passe par l’héroïne », finit par écrire les aventures de Catherine. Depuis, à raison de deux livres par an, Juliette continue de « distraire les gens de leurs soucis en essayant de leur apprendre quelque chose ». Quand elle n’écrit pas, elle apprend des vers de Racine, reçoit ses nombreux amis, cuisine, goûte l’art et la musique ou salue les dames du bois pour qui elle a un faible depuis qu’en 1942, à la naissance de son fils qu’elle ne pouvait allaiter, les prostituées soignées par son premier mari médecin l’approvisionnèrent deux ans durant en oranges fraîches. Juliette est ainsi: bûcheuse, gourmande et tendre avec les autres, les personnages de ses romans où l’art du suspense joue avec une très sérieuse documentation.

    Le secret de Juliette

    Par Pons Anne, publié le

    Trahisons, meurtres, amours contrariées: Juliette Benzoni connaît la recette du best-seller. Elle le prouve cette fois encore avec Secret d’État

    En dépit de la crise, le rêve à grands tirages se porte bien, merci. Mais, alors que les Américains touillent des techno-thrillers futuristes dans les cuisines de l’an 2000, ici c’est toujours dans les vieux pots qu’on fait les bonnes soupes du best-seller. D’un côté, les Turbulences des vols transpacifiques, les manipulations génétiques, les virus en goguette. De l’autre, les chansons de toile, les filles d’honneur rougissantes et les bâtards de l’histoire de France. Des cycles romanesques – jamais moins de trois volumes, souvent plus – un côté prolifique à faire pâlir Dumas.

    Héritière de la littérature populaire du XIXe, Juliette Benzoni a débuté sa carrière dans une émission de Pierre Sabbagh qui s’intitulait Le Gros Lot. Prémonitoire. Le succès phénoménal du Boiteux de Varsovie ou des Treize Vents n’a pas démenti cette promesse de l’aube. C’est donc droit dans ses bottes de mousquetaire que Juliette Benzoni s’attelle au tome I de La Chambre de la reine. Pieds nus, sa chemise souillée de sang, une petite fille erre dans la forêt d’Anet. Adoptée par la mère de François (de Bourbon-Vendôme, l’un des petits-fils d’Henri IV et de Gabrielle d’Estrées), elle verra son destin l’amener à côtoyer Anne d’Autriche, Louis XIII, Richelieu et le sadique assassin des siens… Pas plus que dans les best-sellers de Forsyth ou de Crichton l’auteur n’en appelle à la psychologie. On avance à coups de secrets d’Etat, de trahisons, de meurtres de prostituées, d’amours contrariées, le tout au son de la jolie voix de Sylvie, qui charme les oreilles du cardinal.

    A quoi tient la pénétration profonde de ce type d’ouvrages dans notre société? Au fait que ce sont des livres « tout public »? Quand on sait que certains romans de Juliette Benzoni sont traduits en 17 langues et que, de 30 000 en librairie, ils sautent à 300 000 avec le soutien des clubs, on s’interroge, une fois de plus, sur le passéisme qui fonde l’air du temps.

    La Chambre de la reine. Tome I: Secret d’Etat, par Juliette Benzoni. Plon, 467 p., 135 F.