Palais des Rois de Majorque

 

 

Le Palais des Rois de Majorque

 

La renaissance du fleuron de l’architecture gothique en Roussillon

Premier palais édifié par le premier souverain de la dynastie, le palais des rois de Mallorca de Perpignan s’inscrit dans la lignée des grands palais-forteresses de la fin du Moyen Age qu’il précède de plusieurs décennies tels le Palais des Papes d’Avignon ou les châteaux de Karlstejn (Tchéquie) et de Vincennes. Restauré à partir de la fin des années 1940, ouvert au public en 1958, son parti architectural est encore source de discussions passionnées et passionnantes. L’étude archéologique du bâti commandée par le Conseil Général des Pyrénées Orientales et réalisée en 2004 par Agnès Marin pour HADES a permis de mieux connaître la chronologie de sa construction. En 2009, le Pôle Archéologique Départemental dirigé par Olivier Passarius a mené les fouilles induites par la restauration du pavement de la grande cour. Elles ont mis au jour plusieurs silos à grain et un réseau de canalisations destinées à approvisionner la citerne du palais en eau de pluie. Plus inattendu, un site datant du néolithique a été découvert à l’entrée du monument. Le premier colloque international consacré au palais s’est tenu dans ses murs en 2011, année du 700ème anniversaire de la disparition de son constructeur, le roi Jaume II de Mallorca.

Un royaume catalan

Le 21 août 1262, Jaume Ier el Conqueridor, roi d’Aragon, lègue à Pere, son fils aîné, le royaume d’Aragon, la principauté de Catalogne et sa dernière conquête, le royaume de Valencia. Il donne à Jaume II, son cadet, le royaume de Mallorca (îles de Mallorca et Eiviça/Ibiza dans les Baléares), les comtés de Roussillon et de Cerdagne et la seigneurie de Montpellier.
Contesté par les rois d’Aragon qui confisquent momentanément les îles, le nouveau royaume connaît des débuts difficiles. La paix revenue, les îles lui sont restituées augmentées de l’île de Menorca, dernière étape de la Reconquête chrétienne des territoires musulmans en Méditerranée occidentale. Il se développe ensuite rapidement sous les rois Jaume II (1276-1311) et Sanç (1311-1324). Les villes, notamment Perpignan, connaissent un essor remarquable. Les grands chantiers se multiliplient : palais, églises, couvents. Les souverains favorisent l’industrie et le commerce. Dans les ports de Mallorca et Collioure transitent des dizaines de navires qui sillonnent toute la Méditerranée. Le royaume atteint son apogée pendant la régence de Felip (1324-1329) et sous Jaume III (1329-1349).
Le développement de la draperie roussillonnaise symbolise le dynamisme majorquin. A peine présents au XIIIème siècle à Prats de Mollo et Perpignan, ville de foire où circulent draps flamands et languedociens, les drapiers prospèrent au XIVème siècle. Par leur savoir-faire marchand et technique, pareurs et tisserands catalans s’imposent en moins de trois décennies à Valencia, à Mallorca, en Sicile.
Le 25 octobre 1349, chassé de son trône par Pere IV d’Aragon, Jaume III meurt sur le champ de bataille de Lluchmajor. Ses domaines catalans réintégrèrent l’Aragon tandis que la France acquiert Montpellier. Dès lors, l’ancien palais des rois de Mallorca héberge les souverains aragonais pendant leurs séjours perpignanais et le pape d’Avigon Benoît XIII y réside en 1408.

Un palais royal de la Méditerranée

Le palais des rois de Mallorca est un palais-forteresse de style gothique. Construit dans le dernier quart du XIIIème siècle par le roi Jaume II qui s’installe à Perpignan en 1276, sa construction s’achève à l’orée du XIVème siècle. Entouré de jardins, il s’élève sur une colline au sud de la ville, le « puig del rey ». Dans le sillage du souverain, les premiers maîtres d’oeuvre sont Ramon Pau et surtout Pons Descoyl, très actif à Perpignan et dans les îles Baléares.
Le plan du palais, très fonctionnel, forme pratiquement un carré de 60 mètres de côté. Il s’organise autour de trois cours dominées par la chapelle en position centrale qui marque la prépondérance du spirituel sur le temprel. L’architecture de la chapelle la rapproche de la Sainte-Chapelle de Paris, de peu antérieure, avec ses deux sanctuaires superposés et son large porche. De part et d’autre, la résidence royale s’ouvre sur deux cours intérieures. On pénètre dans le palais par l’ouest dans la cour la plus vaste où se déroule la vie publique. Outre la chapelle, on retrouve ici la « grande salle », siège du pouvoir politique, la salle du trône et la chancellerie. L’élégance des portiques et des galeries qui allègent les façades principales s’oppose à l’austérité de l’enveloppe extérieure, percée d’archères et couronnée d’un crénelage en briques.
Les murs du palais, construits en galets et en briques liés au mortier, étaient enduits à la chaux et peints. Portes, fenêtres, galeries, escaliers, chaînes d’angle des murs, tours principales sont en pierres de taille : pierre ocre ou bleue, marbre rouge de Villefranche-de-Conflent, blanc et bleu de Céret, grès.

 

Plan et coupe du palais:

1 – Fossé ; 2 – Barbacane ; 3 – Tour de l’Hommage ; 4 – Salle du trône ou Palais blanc ; 5 – Salle à manger ; 6 – Premier logis royal ; 7 – Grande salle ou Aula ; 8 – Logis de la reine ; 9 – Couloir ; 10 – Logis du roi ; 11 – Chapelle Sainte-Croix ; 12 – Chapelle Sainte-Madeleine

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